Depuis quelques mois se dessine une lutte antivalidiste importante à laquelle nous nous devons d’être les relais et le soutien.
Aminata Pouye souhaite déménager en Province pour offrir un meilleur cadre de vie à ses enfants et décide donc de préparer l’inscription de sa fille Méïra, dont le syndrôme de microdélétion 8p23.1 nécessite des aménagements, à l’école du Pivollet à Val-de-Reuil, un mois en avance. Sans autre retour, elle sera informée par simple mail, la veille des vacances scolaires, qu’une décision d’orientation en ULIS a été prise par la directrice académique.
Une première altercation téléphonique a lieu avec l’adjointe de l’inspectrice académique lorsqu’Aminata exprime son refus de la décision et sa volonté d’assurer la scolarisation en ordinaire avec AESH.
Un mail n’étant pas un document conforme pour une telle décision administrative, Aminata décide donc d’emmener sa fille à l’école du Pivollet le jour de la rentrée des classes. Deux policiers se trouvent au portail de l’école ainsi qu’un représentant de l’inspection académique qui n’hésite pas à la culpabiliser d’insister pour avoir une AESH alors qu’on ne peut pas lui en proposer.
Dans l’incapacité de fournir un document conforme, l’école du Pivollet accueillera Méïra. Seulement l’établissement ne souhaite pas démordre de l’orientation en ULIS et va dans un premier temps conclure à l’interdiction de Méïra de se rendre à l’école durant le remplacement de son maître parti accompagner une classe de neige. Puis il va ignorer les demandes d’explication d’Aminata à propos d’une tuméfaction retrouvée sur la joue de sa fille. Sera organisée en urgence une réunion ESS afin d’imposer l’ULIS, menace d’exclusion et de signalement à l’appui.
Cette fois-ci Aminata reçoit un courrier de l’inspecteur académique qui annonce l’exclusion de Méïra en raison du refus de l’ULIS. Le courrier étant jugé non conforme par l’Officier de Police Judiciaire, l’école doit accueillir Méïra.
Lors de leur rencontre avec Marc-Antoine Jamet, le maire de Val-de-Reuil, les parents de Méïra déchantent : le seul objectif pour le maire est de s’assurer du maintien de l’ordre public, les violences vécues par Méïra n’étant pas sa priorité. Il est donc entendu que Méïra reste exclue de l’école puisque ses parents refusent l’orientation en ULIS.
Suivront trois jours où seront mobilisées les forces de police au portail de l’école. Méïra pourra entrer mais sera isolée en salle des maîtres avec son AVS, à l’écart de sa classe, ce qui aura pour conséquence de lui provoquer une crise d’épilepsie nécessitant d’être hospitalisée.
Un nouveau mail tombe : Méïra est exclue 3 jours de l’école en raison de l’agressivité de sa mère et pour être protégée du harcèlement qu’elle subit.
Aminata décide de révéler ce chantage institutionnel qu’elle subit depuis le mois de février sur les réseaux sociaux et se voit dénigrée depuis, notamment par M. Jamet qui s’est exprimé sur le site de la ville de Val-de-Reuil ainsi que dans les médias. Pour se défendre et apporter sa version des faits, Aminata a répondu aux questions de France 3. Depuis elle continue de nous tenir au courant via son compte Tik Tok. Prochainement aura lieu une rencontre avec le Ministère de la santé.
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Ce qui se joue ici c’est la lutte d’une mère qui, en connaissance de ses droits et de ceux de sa fille, refuse les décisions arbitraires des institutions. Il ne s’agit pas d’un incident anecdotique. Le parcours de cette maman est bien connu des parents d’enfants handicapés.
Nous condamnons les pratiques de l’Éducation nationale et de la Mairie qui consistent à imposer une seule et unique solution à Méïra et à dénoncer dans le même temps le refus légal d’une mère, présenté comme un agressif envers le personnel de l’établissement et inquiétant vis-à-vis de sa propre fille.
Faire passer l’orientation en ULIS comme ultime accès à l’éducation pour Méïra, en plus d’être juridiquement faux, est un chantage institutionnel grave. Une enfant ayant jusqu’ici été maintenue en classe ordinaire avec AESH, dont un essai du dispositif ULIS en 2018 s’est averré être un échec, et dont les praticiens et les parents s’entendent sur une scolarisation en milieu ordinaire, ne devrait en aucun cas subir une décision par la directrice académique d’une orientation en ULIS ainsi qu’une interdiction d’entrer dans son école.
Nous condamnons aussi la mobilisation de l’établissement visant à empêcher Méïra de poursuivre sa scolarité jusqu’aux portes de l’école, ainsi que les isolements répétés ayant eu pour conséquence d’aggraver son état de santé au point de la conduire à se faire hospitaliser.
Nous condamnons l’absence de prise en charge des violences physiques qu’elle a subies de la part d’un élève de l’école, un des motifs légitimes de la colère d’Aminata passé sous silence dans les communications institutionnelles.
Enfin nous soutenons Aminata dans sa dénonciation des violences racistes de la directrice de l’établissement, soutenue par le maire de la ville.
Lundi 22 mai, l’école du Pivollet a fait valoir son droit de retrait “en raison d’un conflit qui les oppose à une parent d’élève”. Ce qui est appelé “conflit” ici est en réalité une lutte légitime pour le respect des droits d’une enfant handicapée à être scolarisée en milieu ordinaire.
L’ULIS n’est pas un maintien en milieu ordinaire. L’image d’un dispositif qui permettrait l’apprentissage au rythme de l’élève et l’inclusion parcimonieuse en classes ordinaires ne coïncide pas avec la réalité expérimentée par de nombreuses familles. Ce que les politiques publiques appellent inclusion, c’est en réalité tout un programme qui vise à intégrer des populations initialement exclues par des politiques antérieures. Parler d’inclusion sous-entend qu’une exclusion a eu lieu. C’est ce paradoxe que vivent les familles et que nous dénonçons aujourd’hui.
Nous apportons notre soutien à Méïra, sa mère Aminata Pouye et son conjoint, dans leur lutte pour le droit à une scolarisation sans exclusion ni harcèlement, qui s’adapte à l’intérêt de l’enfant et non aux intérêts gestionnaires d’une politique éducative à bas coûts qui favorise la ségrégation des enfants handicapés plutôt que leur maintien en milieu ordinaire.
Cet article est un communiqué pour Objectif Autonomie, retrouvez nos communications sur notre site.